Secteur des TIC Par le doctorant Rodrigue Tchejp

N°46- Affichages : 760

Inefficacité des normes ou vide législatif ?

L’expansion du numérique dans le monde relève aujourd’hui d’une lapalissade. Comme la mondialisation, l’interconnexion des peuples se fait et se fera dorénavant par le canal des technologies nouvelles qui sont celles de l’information et de la communication. Son domaine est si précis, pourtant à y voir de très près, l’information et la communication sont loin d’être les seules concernées par cette technologie nouvelle. Pour pallier au rapetissement d’un domaine aussi vaste, l’appellation aujourd’hui consacrée est celle de numérique. Cette nouvelle appellation permet à cette technologie de s’introduire dans tous les domaines de la vie humaine. Le numérique devient un élément de la vie en société. Celle-ci étant régie par le droit selon la maxime consacrée ubisocietasibi jus, bien que discutable dans les contextes des sociétés africaines et encore plus camerounaise, cette discipline ne manque pas comme bien d’autres de s’en saisir pour y établir une certaine régulation.

Comme on peut le constater, le droit est infatigable. Il se saisit de tous les aspects de la vie de l’homme, surtout quand ils sont nouveaux. Hier déjà on parlait de droit des TIC, aujourd’hui de droit du secteur numérique et encore de plus en plus il est disséqué pour obtenir des droits plus spécifiés comme le droit des logiciels, droit d’internet, droit des réseaux etc… On doit cependant  reconnaitre que le numérique en tant que structure de modification des comportements sociaux agit sur les branches du droit existant et ébranle leurs textures. A travers le numérique, on peut commercer, commettre des infractions, communiquer, informer, voter, etc… On observe par ce fait la dématérialisation des activités humaines non sans conséquences. Cette observation nous conduit donc à s’interroger sur ce secteur, l’efficacité des normes de régulation et surtout sur leur effectivité. Il ne s’agit point de vaines questions. L’observation de la société camerounaise conduit au constat de l’usage inadéquat des technologies de l’information et de communication et partant du numérique. Les communications dans les réseaux sociaux en sont une illustration de cette dérive. Il n’est plus un secret pour personne que de dire que ces réseaux constituent un no man’s land. Chacun y va comme il pense et l’utilise très souvent à des fins répréhensibles. Combien sont-ils  qui se sont vus injurier, arnaquer ou diffamer par le biais du numérique ? La moisson sera grande si on procédait à un inventaire. Cette situation n’est cependant pas due à une absence de régulation même si parfois on peut observer un certain vide législatif. Et donc pour répondre à notre questionnement et apporter des observations sur la situation du droit du numérique au Cameroun, il est indiqué de scruter l’état et l’efficacité des normes existante avant de démontrer les négligences du législateur dans un domaine aussi important.

L’ÉTAT DE LA RÉGULATION DU SECTEUR DES TIC AU CAMEROUN

La protection de l’individu et de la société contre la mauvaise utilisation des technologies est nécessaire et doit être prise en considération par les règlementations. L’objectif de toute régulation est en général un fonctionnement correct pour permettre le respect des valeurs supérieures de la société et assurer un minimum d’équité. Faut-il rappeler cette belle expression du philosophe la CARDERE ; « entre le faible et le fort c’est la loi qui libère ». La préoccupation essentielle du droit est à la fois de prohiber certains comportements et de maintenir certaines valeurs. Le droit, devant savoir s’adapter aux technologies, il n’a pas échappé au législateur camerounais qu’il devait produire des normes pour réguler le secteur des TIC. L’inventaire des normes produites jusqu’à ce jour au Cameroun met en présence la Loi n° 2010/012 du 21 décembre 2010  relative à la cyber sécurité et à la cybercriminalité. Cette loi régit le cadre de sécurité des réseaux de communications électroniques et des systèmes d’information, définit et réprime les infractions liées à l’utilisation des technologies de l’information et de la communication au Cameroun. A ce titre, elle vise notamment à : 

On peut aussi citer la Loi n°2010/021 du 21 décembre 2010 régissant le commerce électronique au Cameroun. Cette dernière loi résulte de l’impulsion du droit communautaire, notamment de l’Ohada qui dans la réforme de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général en 2010 aborde la question. La principale innovation a consisté en l’intégration des technologies de l’information dans l’accomplissement des formalités relatives au droit commercial ainsi qu’aux sûretés par le biais des registres nationaux et régionaux du commerce et de crédit mobilier. Le nouvel Acte uniforme devrait également contenir des dispositions relatives à l’ « écrit électronique »; à la « signature électronique qualifiée » ainsi qu’à « l’archivage électronique ». La loi camerounaise vient ainsi encadrer l’activité économique par laquelle une personne effectue ou assure par voie électronique la fourniture des biens ou des services : le commerce électronique.

Toujours en cette année de 2010 le législateur camerounais a proposé une autre loi dans le secteur du numérique ; il s’agit de la Loi n° 2010 / 013 du 21 décembre 2010 régissant les communications  électroniques au Cameroun. Cette dernière loi régit les communications électroniques au Cameroun.

A ce titre, elle :

La Loi n°2010/021 du 21 décembre 2010 régissant le commerce électronique au Cameroun vient aussi réguler un secteur pas moins important. Les échanges en ligne prennent de la proportion dans l’activité commerciale. La loi précise que l’exercice du commerce électronique est libre à l’exclusion :

Quant à la Loi n° 2010/013 du 21 décembre 2010 régissant les communications  électroniques au Cameroun, on peut constater qu’il est établi un régime juridique des réseaux et des services de communications électroniques, les dispositions communes aux régimes d'autorisation et de déclaration, la réglementation de la régulation et du contrôle des communications électroniques, l’aspect le plus le marquant la protection du consommateur. Les articles 51 et suivant de la Loi disposent que les consommateurs, dans leurs relations avec les opérateurs, ont droit à un contrat d’abonnement dont le modèle est préalablement validé par l’Agence. Le consommateur des services de communications électroniques a droit notamment :

LA NÉCESSITÉ D’UNE NOUVELLE RÉGULATION POUR COMBLER LE VIDE

La montée en puissance de la digitalisation n’épargnant plus aucun domaine de la vie humaine, on devrait s’accorder pour reconnaitre que si certains domaines ont déjà fait l’objet de régulation, il n’en demeure pas moins vrai qu’on puisse constater un vide législatif dans d’autres domaines. Le droit pénal par exemple s’est facilement adapté à Internet, les activités économiques aussi ; même si on doit noter qu’il n’existe pas encore un droit pénal ou économique de l’Internet. Par contre, si nous convoquons les biens et plus précisément le droit d’auteur ou encore le droit des contrats, il serait facile de relever un vide normatif.

Il est évident que le droit d’auteur au Cameroun n’a pas évolué au même titre que l’électronique la protection de la création, des brevets et autre logiciels informatiques ne peuvent répondre au critère matériel de protection de l’œuvre de l’esprit. On peut bien se demander si les droits actuels peuvent efficacement régir les créations dans le domaine du numérique.

En plein essor, le commerce sur Internet s’épanouit actuellement dans des conditions de sécurité juridiques peu satisfaisantes. Des transactions sont conclues entre cocontractants qui s’ignorent, mais acceptent de se fier à des rencontres purement électroniques. Elles ne sont à l’abris ni d’un disfonctionnement accidentel du réseau, ni d’agissements malveillants des tiers, ni enfin d’un comportement malhonnête du correspondant lui-même.  Sauf précaution particulière, le risque n’est pas négligeable d’être trompé par une fausse identité, un message dont le contenu a été volontairement ou non altéré, ou dont l’expéditeur refuse d’endosser la paternité.

Le défi à relever par le droit en général est l’adaptation de ses règles à la dématérialisation des opérations. La réalisation de cet objectif  passe impérativement et préalablement par le renforcement des normes applicables aux contrats en ligne. On aurait pu s’attendre à ce que le commerce électronique engendre une globalisation  des pratiques, et pourquoi pas une conception diffuse et désincarnée des agents du droit. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication sont de nouveaux risques à un coût très bas. Elles ajoutent de nouveaux risques à ceux traditionnellement encourus par les consommateurs. Elles contribuent également à la complication des risques existants. Les pouvoirs publics se doivent d’exercer une surveillance attentive pour préserver l’intérêt général menacé par les intérêts particuliers.  Par exemple, pour une protection efficace du cyberconsommateur face aux mirages de la publicité, sa réglementation doit sortir de la sphère traditionnelle du contrôle du contenu pour s’étendre au support lui-même.

Si l’Internet offre à l’évidence de nouvelles formes de communication, l’Etat doit nécessairement prendre des mesures pour protéger ces diffusions. L’internet crée un nouvel espace publicitaire, son développement appelle une étude de nouvelles questions juridiques posées par la publicité en ligne. D’une manière générale, le dispositif légal camerounais a vocation à garantir des pratiques loyales en matière de publicité. Par ailleurs il veille à ce qu’elle ne porte pas atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs.

Le développement de la vente électronique nécessite la mise en place d’éléments propres à entraîner la confiance des consommateurs dans leurs transactions. Par tout ceci une réforme des textes sur le numérique reste une nécessité absolue.

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