Présidentielle américaine : Donald Trump est élu contre toute attente

Après cette victoire inattendue de Donald Trump, journalistes et éditorialistes dressent un constat accablant : les médias traditionnels, en profond décalage avec l'électorat de Donald Trump, n'ont pas su prévoir ce vote. « Nous ne pensions pas que nos concitoyens voteraient finalement pour un candidat si manifestement incompétent pour cette fonction, si inquiétant, et au tempérament instable », écrit l'économiste Paul Krugman, éditorialiste pour le prestigieux New York Times depuis 1999. Ce que nous savons, c'est que des gens comme moi, et probablement comme la plupart des lecteurs du New York Times, ne comprennent pas vraiment le pays où nous vivons ».  les Américains, même ceux qui ont manifesté contre l’élection de Donald Trump, vont devoir, comme le monde faire avec. Et puis, un homme peut en cacher un autre.

En travaillant ensemble nous allons commencer à reconstruire le pays et à rendre à l'Amérique sa grandeur. (...) Les hommes et les femmes oubliés de ce pays ne seront plus oubliés. (...) Nous avons un grand plan économique pour doubler la croissance. Nous allons nous entendre avec toutes les nations qui voudront s'entendre avec nous. Nous devons reprendre en main la destinée de ce pays, nous devons rêver en grand. Je veux dire à la communauté internationale que, si l'Amérique passera toujours en premier, nous serons justes avec tout le monde.»

C’est par ce discours improvisé devant ses supporteurs et électeurs républicains  et le monde entier encore médusé par cette victoire surprise que Donald Trump sacralise son élection comme 45e président des Etats-Unis. Il n’a pas manqué de mentionner sa rivale Hillary Clinton : « Elle s'est battue longtemps, et nous lui devons de la gratitude pour son sacrifice à ce pays», a-t-il déclaré. Donald Trump a ensuite assuré qu'il serait « le président de tous les Américains ».

C’est donc contre toute attente que le candidat républicain Donald Trump s’est imposé face à Hillary. L’élection de Donald Trump a provoqué un coup de tonnerre dans le monde entier. Longtemps, les médias l’ont pris pour un clown. Et se sont gaussés de ses pitreries, synonymes de buzz et d’audience. Même les marchés financiers se sont déstabilisés à l’annonce des résultats. Le ministère des Finances japonais, l’Agence des services financiers et la Banque du Japon (BoJ) avaient décidé une réunion d’urgence pour examiner la situation sur les marchés

QUE S’EST-IL PASSÉ ?

Simplement, Trump a dominé dans de nombreux Etats-clé (swing states), dont la Pennsylvanie, l’Ohio, la Floride, l’Iowa et la Caroline du Nord, devançant ainsi sa rivale Hillary en termes de grands électeurs.  Les « swing states » sont des états qui ne sont pas traditionnellement acquis à l’un des deux partis, et dont l’électorat peut « basculer » (« swing ») d’un bord à l’autre à chaque élection. Bien entendu, plus un « swing state » compte de grands électeurs, plus son résultat a des chances de faire basculer la victoire.

 CE QUE L’ON RETIENT DE LA CAMPAGNE DE TRUMP

"Mesdames et messieurs, je suis officiellement candidat" avait déclaré Trump après avoir annoncé sa candidature aux primaires républicains, le 16 juin 2015 à New York (Etats-Unis). "Mesdames et messieurs, je suis officiellement candidat à la présidence des Etats-Unis, et nous allons rendre à l'Amérique sa grandeur." Il dénonce "la mort du rêve américain", déclassé face aux assauts de la Chine ou du Japon. Surtout, Donald Trump désigne les boucs émissaires de sa campagne : les immigrés, venus de l'autre côté du Rio Grande. « Quand le Mexique nous envoie ses gens, il ne nous envoie pas les meilleurs, lance-t-il alors. Il envoie les gens qui ont beaucoup de problèmes. (...) Ils apportent avec eux la drogue, ils apportent le crime. Ce sont des violeurs.»

A ce moment-là, peu de commentateurs l'imaginent avec entre les mains les codes de l'arme nucléaire américaine. Il suffit de lire la presse le lendemain de l’annonce de sa candidature pour s'en convaincre.  « Un clown candidat à la présidence », titrait alors le New York Daily News, en grimant le milliardaire en triste saltimbanque à sa une et en le qualifiant de "bouffon" dans ses articles. Plus sérieux, le New York Times évoque la "quête improbable" du businessman, présenté comme un  « volubile développeur immobilier dont le nom orne des immeubles d'appartements, des hôtels, des cravates et des steaks ». Comment peut-il gagner ?   « Vous nous posez une colle", répond le prestigieux quotidien. »

Bien décidé à faire de l'immigration l'un des thèmes majeurs de sa campagne, il atterrit le 23 juillet à Laredo, au Texas, commune voisine du Mexique. « La première chose à faire, c'est de sécuriser nos frontières », avait-il annoncé. Ce qui l’a fait caracoler en tête des sondages.

"PAS LE TEMPS POUR LE POLITIQUEMENT CORRECT"

Sur scène, le milliardaire continue de faire l'attraction. L'une des journalistes les plus en vue de Fox News, Megyn Kelly, l'interroge sur son sexisme.  « Est-ce que vous pensez que c'est le tempérament dont nous avons besoin pour un président ? »  « Franchement, je n'ai pas le temps pour le politiquement correct, élude Donald Trump. Et pour être honnête avec vous, ce pays n'en a pas le temps non plus ». L'affaire aurait pu en rester là. Mais le lendemain, le milliardaire accuse Megyn Kelly de lui avoir réservé un traitement "injuste" et déclare n'avoir "pas beaucoup de respect pour elle". « On pouvait voir du sang sortir de ses yeux, du sang sortir de son… où que ce soit.» Une allusion claire aux menstruations de la journaliste.

LE CHAMPION DES INSULTES

Nouvelle polémique, nouvelles reprises dans la presse. Le scénario est bien rodé. En un an de campagne, l'homme d'affaires a insulté 239 personnes ou entités, selon un décompte du New York Times. Que ce soit ses adversaires Jeb Bush, Ted Cruz ou Marco Rubio, des journalistes, des experts, voire des pays tout entiers. Personne n'a été épargné.

Pendant la campagne, il se démarque en jouant la surenchère, notamment sur l'immigration. Dans la foulée des attentats du 13 novembre à Paris, il laisse entendre qu'il est favorable à la création d'une base de données des musulmans présents sur le sol américain, avant de préciser qu'il ne pensait qu'aux réfugiés syriens. Un mois plus tard, après la fusillade de San Bernardino, attribuée à des "partisans" du groupe Etat islamique, il propose purement et simplement d'interdire l'entrée sur le territoire de musulmans étrangers. Autant de propositions qui semblaient parfois lui venir sur un coup de tête.

Etude après étude, le milliardaire continue de grimper dans les intentions de vote. Incrédules au départ, les médias sont bien obligés de prendre la mesure du phénomène. Dès le mois d'août, dans le Hollywood Reporter, Donald Trump évoque l'exemple de Ronald Reagan, ancien acteur devenu président.  « Il l'a fait, je peux aussi le faire », proclame-t-il en une. En septembre, Rolling Stone appelle à prendre Trump au sérieux".  « Panique à Wall Street : Donald Trump pourrait gagner», écrit Politico au même moment.

A QUOI VA RESSEMBLER L’AMÉRIQUE DE TRUMP

Nombre de propositions du nouveau président semblent impossibles à mettre en œuvre, même une fois installé dans le bureau ovale. La preuve, Hillary ne sera plus poursuivie, et l’Obama Care, au lieu d’être abrogé, sera simplement amendé.

Depuis des mois, Donald Trump a promis  de  « rendre sa grandeur à l'Amérique ». Derrière ce slogan de campagne, le milliardaire, devenu le 8 novembre le 45e président des Etats-Unis, a longtemps brillé par le flou qui entourait ses propositions. Désormais, son site officiel se veut plus exhaustif et aborde des thèmes variés : Constitution, cybersécurité, économie, éducation, énergie, santé, défense...

 Elu chef de l'Etat, il va devoir s'atteler à la réalisation de ces promesses. A quoi ressembleront les Etats-Unis sous son mandat ? Franceinfo a livré les grandes lignes de son programme, des propositions les plus incongrues aux plus crédibles.

SUR L'IMMIGRATION, UNE AMÉRIQUE FERMÉE À DOUBLE TOUR

Pour lancer sa campagne, en juin 2015, Donald Trump a frappé fort. C'est avec une proposition des plus outrancières que le milliardaire a capté l'attention des médias et marqué les esprits : construire un mur tout le long de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique pour mettre fin à l'immigration clandestine.  « Le Mexique nous envoie des gens qui ont beaucoup de problèmes, expliquait alors Donald Trump. Ils ramènent de la drogue, du crime, ils envoient leurs violeurs.»

Ensuite, mettre fin au droit du sol, comme Donald Trump le propose, semble compliqué à la lecture de la Constitution des Etats-Unis.   « Toute personne née ou naturalisée aux Etats-Unis, et soumise à leur juridiction, est citoyen des Etats-Unis et de l'Etat dans lequel elle réside », stipule en effet le 14e amendement du texte. La Cour suprême s'est déjà penchée sur ce texte en 1898.

Après avoir préconisé de bannir temporairement les musulmans étrangers, Donald Trump ne propose plus que de suspendre l'entrée sur le sol américain des personnes venues  « des régions les plus dangereuses du monde qui ont un passif dans l'exportation du terrorisme ». D'autres propositions sont nettement moins controversées : généraliser l'usage de la plateforme E-Verify, censée permettre aux employeurs potentiels de vérifier le statut migratoire d'un candidat à un emploi, ou mieux surveiller les détenteurs de visa sont des idées relativement sérieuses, d'après Real Clear Politics.

EN POLITIQUE ÉTRANGÈRE, UNE AMÉRIQUE ISOLATIONNISTE

En matière de politique étrangère, Donald Trump estime que sous son mandat, « l'armée américaine sera si puissante qu’il ne pense pas que les Etats Unis auront besoin de l'utiliser, car Personne ne viendra  les chercher.» Pour lutter contre le groupe Etat islamique, le nouveau président compte couper les ressources des jihadistes en faisant "exploser" les installations pétrolières de la région. Après ça, « il n' y aura plus rien », promettait le candidat, et les compagnies pétrolières américaines pourront se rendre sur place et reconstruire.

Donald Trump défend notamment une position isolationniste, en remettant en cause la plupart des accords de libre-échange signés par les Etats-Unis, pas assez "justes" à son goût. Rien d'exubérant, note le Washington Post : même si le libre-échange est un pilier de la politique étrangère du pays depuis 1945, les appels au protectionnisme se multiplient ces dernières années. Certes, la partie serait difficile pour Donald Trump, qui devrait faire face à un corps diplomatique hostile, comme l’a noté Politico. Mais le pouvoir de la présidence en la matière est important.

POUR L'ÉCONOMIE, UNE AMÉRIQUE LIBÉRALE

Donald Trump promet de simplifier le Code des impôts. Opérer un gros coup de rabot pour les sociétés, qui se verraient au maximum taxées à 15%, contre 35% aujourd'hui. Limiter le taux maximal d'imposition à 33% pour les plus riches. Et exonérer d'impôt sur le revenu davantage de foyers.

Le milliardaire préconise notamment de limiter le carcan des régulations, en particulier celles établies par l'EPA, l'Agence de protection de l'environnement.

SUR LA SANTÉ, UNE AMÉRIQUE INDIVIDUALISTE

Comme tous les républicains, il veut revoir s "l'Obamacare", la réforme du système de santé portée par Barack Obama.

 Durant sa campagne, Donald Trump a surtout défendu une plus grande concurrence entre les assurances santé, afin de faire baisser les prix. Il souhaite également permettre à chacun de mettre de l'argent sur des "comptes épargne" consacrés aux dépenses de santé.  Et pour ceux qui ne pourront pas se permettre de financer leur couverture médicale ? « Il y aura des gens qui n'ont pas d'argent qui ne seront pas capables d'être couverts », a-t-il reconnu sur CNN, mi-février. A ces Américains les plus pauvres, il a fait une promesse : « Je ne veux pas voir des gens mourir dans les rues.»

En janvier prochain, il prendra ses quartiers à la Maison Blanche. «Il faut reconnaître à Trump une très bonne capacité de diagnostic : il a du nez, note la sociologue, politologue, docteure en science politique de l'université Paris-Dauphine, Marie-Cécile Naves. Il a compris qu’il y avait une brèche dans laquelle s’engouffrer en raison des divisions très fortes au sein du Parti républicain, sur des sujets très importants  : l’économie, l’immigration…»

Pour preuve, il y avait 17 candidats lors de la primaire républicaine, et aucun n’a pu lui faire barrage. Outre le bon tempo, il a également su capter l’air du temps. « Je sais ce qui se vend et ce que les gens veulent », affirmait-il à Playboy en 1990. Dès 1987, il a même élaboré un concept, « l’hyperbole véridique » (en fait, c’est le coauteur de son livre The Art of the Deal qui en est à l’origine)  : « Je joue avec les fantasmes des gens. J’appelle ça l’hyperbole véridique. C’est une forme innocente d’exagération –  et une technique de promotion très efficace. » Même tambouille trente ans plus tard. « Il a compris qu’une grande partie de la société était en colère, avait peur et du mal à accepter un certain nombre de changements sociétaux, écono­miques et culturels », détaille Marie-Cécile ­Naves.

 Synthèse Emilienne N. Soué

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