Dr. Raymond Ebalé Enseignant Chargé de Cours Département d’Histoire Université de Yaoundé I Président de l’Association pour la Sensibilisation sur les Accords Acp-ue (asac)
Sixième et dernier volet sur les questions juridiques autour des APE.
Les mécanismes de règlement des différends inclus dans tous les APE intérimaires jusqu’ici signés (Caraïbes, Afrique Orientale et Australe, Afrique de l’Est, SADC) présentent de grandes similitudes. Essentiellement, ce sont des modifications relativement restrictives du règlement des différends de l’OMC, qui reflètent la vision de l’UE en matière de réforme. Les mécanismes de règlement des différends des APE sont détaillés et ont une orientation judiciaire plutôt que politique ou diplomatique (Karli, 2008). En conséquence, ils renforcent ou font peu pour réduire les contraintes ‘en amont’ et ‘en aval’ rencontrées par les pays en développement dans le recours au règlement des différends de l’OMC (Alavi, 2007; Karli, 2008; Hoekman et Mavroidis, 2000). Robert Hudec (1993, 353) résume l’expérience des pays en développement face au mécanisme multilatéral de règlement des différends dans l’histoire du GATT/OMC.
L’analyse quantitative de la performance des différents pays montre assez clairement que le système de règlement des différends du GATT est, à la marge, plus sensible aux intérêts des forts qu’à ceux des faibles. Cette hypothèse se vérifie dans toutes les phases de la performance – dans les taux de réussite en tant que plaignant, dans les taux de non-respect en tant que défendeur, dans la qualité et les résultats atteints, et dans le point de savoir dans quelle mesure les plaignants sont en mesure de faire avancer des plaintes jusqu’à une décision. La constatation peut-être la plus importante à cet égard est la différence très substantielle dans les taux de retrait préalablement au prononcé d’une décision, ce qui suggère que les pays faibles se heurtent à des obstacles significativement plus grands au démarrage du processus. Busch et Reinhardt (2000) sont du même avis que Hudec et constatent que les réformes à l’OMC, en ajoutant plusieurs milliers de page de nouveau texte de traité, plusieurs nouvelles étapes d’activité juridique par différend (appels, examen de la mise en conformité, et arbitrage de l’indemnisation, par exemple), un nombre croissant de cas de jurisprudence et des retards admissibles dans le respect des décisions défavorables, ont amplifié les obstacles auxquels les pays en développement se heurtent dans le règlement des différends à l’OMC. Ces obstacles peuvent être répartis, en gros, en deux catégories : (a) de nombreux pays en développement ne disposent pas de ressources humaines et financières pour participer de manière effective au système dont l’aspect judiciaire est de plus en plus marqué, avec des processus de plus en plus longs ; et (b) en raison de la nature de leurs économies et de leur dépendance économique vis-à-vis des pays développés, de nombreux pays en développement (en particulier les petits pays) sont peu susceptibles de tirer parti des mesures correctives du règlement des différends de l’OMC.
Le système de règlement des différends de l’OMC (article 19) prévoit la cessation d’une violation comme mesure corrective, c’est-à-dire que le pays contrevenant prend des mesures pour se conformer à ses obligations au titre de l’OMC. Il énonce également des ‘suggestions’ ou ‘recommandations’ sur la façon dont les Membres incriminés peuvent se mettre en conformité, ainsi que les conséquences en cas d’incapacité à se mettre en conformité dans les délais spécifiés. De telles conséquences comprennent l’indemnisation et la suspension des concessions, ou d’autres obligations. L’indemnisation implique que la partie perdante assure à la partie ayant eu gain de cause un nouvel accès au marché ou une alternative mutuellement convenue, c’est-à-dire des paiements monétaires. Dans le règlement des différends de l’OMC, la suspension des concessions et automatique et ne nécessite pas le consentement de la partie perdante. Elle implique généralement l’imposition de droits tarifaires, par la partie ayant eu gain de cause, sur les produits ou secteurs pertinents de la partie perdante (Alavi, 2007 ; Karli, 2008).
Les mesures commerciales de rétorsion (par exemple, la suspension des concessions et d’autres obligations) sont depuis longtemps considérées comme une option non viable pour les pays en développement lésés par de grands pays industriels. Par exemple, si Maurice devait suspendre ses concessions et ses obligations envers l’UE à la suite d’une violation par l’UE d’une certaine obligation commerciale, c’est sur Maurice que pèserait la plus grande part des dommages économiques résultant de cette suspension. Ceci fait de la suspension des concessions une mesure corrective inefficace pour nombre de pays en développement, comme l’a récemment montré le différend Antigua et Barbuda – USA Gambling (concernant les jeux d’argent et de hasard). Bien que perdants dans le différend, les Etats-Unis ont été lents à mettre en œuvre la décision dans un délai raisonnable, mais pour Antigua et Barbuda, les coûts économiques de la suspension des concessions aux Etats-Unis ont été prohibitifs :
La simple adoption de règles et de procédures, qu’elles soient bilatérales ou multilatérales, ne va pas, par un tour de magie, mettre un frein à l’exercice du pouvoir … avoir gain de cause dans un différend devant la loi ne revient pas nécessairement à être gagnant pour ce qui est de ses intérêts économiques. Ce qui compte pour la préservation ou le renforcement des intérêts économiques d’un individu, repose, à terme, sur le pouvoir de négociation de cet individu. Les règles et la mise en application des règles, ce sont, à terme, des questions qui font l’objet de négociations entre états (Drahos, 2005, 14).
C’est en raison de ces contraintes qu’il y a eu des appels et des propositions visant un traitement S&D en faveur des pays en développement dans le cadre du Mémorandum d’accord sur le règlement des différends de l’OMC. Sans le Mémorandum, le traitement S&D porte essentiellement sur les procédures (c’est-à-dire que les pays en développement peuvent choisir une procédure plus rapide, demander l’allongement des délais, ou une assistance juridique auprès du Secrétariat de l’OMC) et est prévu à différents stades du processus de règlement des différends de l’OMC. L’article 4.10 du Mémorandum d’accord prévoit un Traitement spécial et différencié (TSD) dans la phase de consultations du règlement des différends et demande aux Membres d’accorder une attention spéciale aux problèmes et intérêts des pays en développement. Par exemple, si l’objet des consultations est une mesure prise par un pays en développement Membre, les parties peuvent convenir d’étendre les délais fixés pour la consultation. Si, à l’expiration du délai fixé pour les consultations, les parties ne sont pas en mesure de convenir que celles-ci ont abouti, l’article 12.10 du Mémorandum d’accord accorde au Président de l’Organe de règlement des différends (ORD) le pouvoir d’étendre le délai pour les consultations.
L’article 8.10 du Mémorandum d’accord prévoit un traitement S&D au stade de la constitution des groupes spéciaux en permettant à un pays en développement Membre partie à un différend avec un pays développé Membre, de demander l’inclusion dans le groupe spécial d’au moins un ressortissant d’un pays en développement Membre. L’article 12.10 prévoit également que le groupe spécial accorde au pays en développement Membre un délai suffisant pour préparer et exposer son argumentation, si un pays en développement Membre est visé par la plainte. Toutefois, l’article 12.10 du Mémorandum d’accord modère cette disposition en stipulant que ceci ne doit pas affecter le délai global fixé pour que le groupe spécial achève la procédure de règlement des différends. Les articles 21.2, 21.3 (c), 21.7 et 21.8 prévoient un TSD dans la phase de mise en œuvre. Ils stipulent entre autres que :
• Une attention particulière devrait être accordée aux questions qui affecteraient les intérêts des pays en développement Membres dans la détermination du délai raisonnable pour la mise en œuvre ;
• L’Organe de règlement des différends (ORD) doit étudier, à la demande du pays en développement Membre, quelle suite y donner, qui soit appropriée aux circonstances, en plus de la surveillance et des rapports de situation ;
• En examinant quelles mesures il pourrait être approprié de prendre, l’ORD doit tenir compte non seulement des échanges visés dans les mesures contestées, mais aussi de leur impact sur l’économie des pays en développement Membres concernés.
En plus des dispositions du TSD à divers stades du processus de règlement des différends de l’OMC, le système multilatéral de règlement des différends GATT/OMC prévoit un TSD par le biais de l’accélération des procédures énoncée dans la Décision du 5 avril 1966 :
Cette Décision prévoit en premier lieu que le Directeur général utilise ses bons offices et mène des consultations à la demande du pays en développement, afin de faciliter la résolution du différend, là où les consultations entre les parties ont échoué. En second lieu, si ces consultations menées par le Directeur général n’aboutissent pas à une solution mutuellement satisfaisante dans un délai de deux mois, le Directeur général, à la demande d’une des parties, présentera un rapport sur son intervention. L’ORD procédera alors, avec l’approbation des parties, à la constitution d’un groupe spécial. En troisième lieu, le groupe spécial doit tenir dûment compte de toutes les circonstances et considérations se rapportant à l’application des mesures mises en cause, et de leurs répercussions sur le commerce et le développement économique des Membres lésés. En quatrième lieu, la Décision donne au groupe spécial un délai de 60 jours à compter de la date à laquelle la question lui aura été soumise pour présenter ses conclusions. Si le groupe spécial considère ce délai insuffisant, il peut le proroger, avec l’accord de la partie plaignante (OMC, 2004, 112–113.)
L’article 27.2 du Mémorandum d’accord prévoit que le Secrétariat mette à disposition de tout pays en développement Membre qui en fait la demande, un expert juridique qualifié des services de coopération technique de l’OMC. De plus, un conseiller juridique privé peut comparaître devant les groupes spéciaux et l’Organe d’appel comme partie de la délégation d’une partie. Une organisation intergouvernementale, connue sous le nom de Centre consultatif sur la législation de l’OMC (ACWL) a été créée en 2001 pour fournir un avis et une formation sur la législation de l’OMC aux pays en développement et aux pays à économies en transition. Cette organisation est indépendante de l’OMC.
En dépit de ces dispositions, l’effet réel du TSD dans le Mémorandum d’accord de l’OMC reste contestable. Ceci est dû à des raisons diverses et complexes que l’on peut résumer comme suit. Les contraintes rencontrées par de nombreux pays en développement à l’ORD de l’OMC ne peuvent être prises en compte par l’octroi de privilèges en matière de procédures. L’application de tels privilèges pourrait saper la légitimité des résultats des actions. C’est pour cette raison que nombreux pays en développement sont peu disposés à recourir à de telles procédures. Si, dans les négociations, les pays en développement ont tendance à rechercher des privilèges en termes de procédures, dans la pratique du règlement des différends, ils tendent à rechercher l’égalité formelle avec les pays développés.
Les dispositions du règlement des différends dans les APE reflètent largement celles du Mémorandum d’accord du règlement des différends de l’OMC, mais sont relativement plus restrictives. L’insuffisance de loin la plus sérieuse du règlement des différends des APE est son manque de TSD, au vu de son orientation sur le développement et de sa nature d’ALE Nord-Sud. Alors que le Mémorandum d’accord de l’OMC fournit un modeste TSD par le biais des privilèges essentiellement en matière de procédures, les APE intérimaires et l’APE du CARIFORUM ne prévoient pas de TSD de manière explicite. De même, le règlement des différends des APE ne prévoient ni une assistance juridique connexe, ni une forme quelconque d’assistance technique. De manière plus prépondérante, on peut soutenir que les dispositions du règlement des différends dans les APE sont plus restrictives que le système de règlement des différends de l’OMC eu égard à leur manque de flexibilité concernant les délais pour la résolution des différends – en faveur des pays ACP. Si, pour la résolution d’un différend à l’OMC, le délai maximal réglementaire est de 20 mois (y compris les consultations, les décisions des groupes spéciaux et de l’Organe d’appel), le délai réglementaire maximal pour le règlement des différends au titre de tous les APE est de juste un peu moins de 12 mois (cas de l’APE des Caraïbes). Le règlement des différends des APE réduit l’étape des groupes spéciaux à 6 mois (au lieu de 7 à 8 mois dans le cadre de l’OMC), ce qui raccourcit le délai pour déposer les conclusions juridiques. C’est une étape cruciale pour les pays en développement, au vu de leur accès limité aux ressources juridiques (Karli, 2008, 29). La restriction de cet espace dans le règlement des différends des APE le rend encore plus restrictif que le règlement des différends à l’OMC. Il semblerait que la période relativement plus courte d’établissement des groupes spéciaux dans le règlement des différends des APE favorise l’UE, qui dispose d’une capacité juridique suffisante. Toutefois, ce que nous soulignons ici, ce n’est pas que ce délai plus court soit problématique en soi, mais plutôt que, compte tenu des défis humains et financiers auxquels les pays en développement sont confrontés, une certaine flexibilité en leur faveur eu égard à ce délai leur serait utile sans léser l’UE.
Bien qu’il raccourcisse les processus des décisions du règlement des différends et qu’il soit très spécifique sur ces processus (décisions des groupes spéciaux, par exemple), le règlement des différends des APE est curieusement muet sur le délai raisonnable dans lequel les décisions d’arbitrage doivent être mises en œuvre (cas des Caraïbes et de la SADC). Le règlement des différends de l’OMC est spécifique sur le délai raisonnable, qu’il fixe à 15 mois. Par contre, celui des APE demande aux groupes spéciaux de prendre en considération le temps qu’il faudrait normalement au défendeur pour adopter les mesures législatives ou administratives nécessaires pour sa mise en conformité. Il est également conseillé aux groupes spéciaux de prendre en considération les contraintes de capacité manifestes qui peuvent affecter l’adoption par la partie défenderesse des mesures nécessaires pour la mise en conformité. Ceci pourrait être interprété comme un TSD en faveur des pays ACP, mais il n’y a rien dans le règlement des différends de l’OMC qui empêche l’UE d’y recourir également (c’est-à-dire qu’il est symétrique).
Toute asymétrie dans la mise en œuvre des décisions d’arbitrage favorise l’UE, au vu des asymétries entre l’Union et les pays ACP. Le TSD eu égard au délai raisonnable qui serait accordé à la partie perdante pour mettre en œuvre la sentence arbitrale est implicite, mais non précis dans les textes des APE. Comme Karli (2008) l’a souligné, même cette disposition spéciale et différenciée minimale et implicite est problématique, car elle ne réglemente que les cas où un pays ACP est défendeur, mais est muette sur les cas où l’UE est la partie perdante. Ceci est significatif pour les pays ACP, car, compte tenu de la dépendance de leurs économiques vis-à-vis des échanges avec l’UE, un retard dans la mise en œuvre des décisions d’arbitrage peut avoir des effets négatifs sur leurs économies.
Le caractère relativement restrictif des délais du règlement des différends des APE est également dû en partie à l’absence d’examen en appel dans les APE, ce qui signifie que les délais sont plus courts que dans le règlement des différends de l’OMC. Ceci en soi est une faiblesse majeure du règlement des différends des APE.
Le règlement des différends des APE est également plus restrictif que celui de l’OMC eu égard aux dispositions ayant trait aux membres des organes de règlement des différends. L’article 8.1 du Mémorandum d’accord de l’OMC permet de manière explicite aux responsables gouvernementaux de faire partie des groupes spéciaux de l’OMC, bien que les membres du gouvernement ou les citoyens des parties à un différend soient exclus. Par contre, le règlement des différends des APE interdit la désignation de responsables gouvernementaux comme membres des groupes spéciaux. Ceci n’est pas un problème en soi, car l’impartialité des responsables gouvernementaux est une préoccupation légitime. Ce qui pose problème, c’est l’absence de clarifications eu égard à ce critère. Par exemple, on ne voit pas clairement si ceci s’applique à toute personne ayant servi dans un gouvernement, qu’elle ait été ou non membre du gouvernement au moment du règlement du différend. Les APE prévoient une liste permanente d’arbitre devant être établie au moment de l’entrée en vigueur des accords (cas de l’APE de l’Afrique de l’Est, de la SADC et des Caraïbes). On ne voit pas clairement quand et comment la condition de non-affiliation à un gouvernement est remplie
A l’exception de l’APE de la SADC, toutes les dispositions ayant trait au règlement des différends dans les APE prévoient que les parties choisissent chacun 5 individus et conviennent de 5 autres personnes qui ne soient des ressortissants d’aucune des parties. L’APE de la SADC prévoit 5 membres pour chaque partie et 5 non-ressortissants. toute mesure qui restreint le choix des pays APE eu égard aux membres des groupes spéciaux limite l’impartialité du règlement des différends des APE. S’ils ne sont pas en mesure de choisir les membres qu’ils veulent pour les groupes spéciaux, les pays seront peu susceptibles d’avoir confiance dans les décisions d’arbitrage. Au vu de la capacité technique limité dans les pays ACP, le manque de clarté sur le critère des responsables gouvernementaux comme membres des groupes spéciaux est susceptible de restreindre la réserve de compétences techniques dans laquelle les pays ACP peuvent puiser pour désigner des membres des groupes spéciaux.
Rompant avec le système de règlement des différends de l’OMC, tous les APE prévoient une compensation comme mesure de rétorsion de premier choix. Ceci a certes été salué dans certains cercles, mais cette compensation est subordonnée à l’accord mutuel des parties. Ceci n’est pas à la hauteur de la suspension des concessions de l’OMC, qui ne fait pas l’objet d’accord entre les parties. Alors que le système de règlement des différends de l’OMC ne contient aucune disposition décrivant la forme que la compensation pourrait prendre, tous les APE, sauf ceux du Ghana et de la Côte d’Ivoire, contiennent des clauses potentiellement importantes. Par exemple, les APE des régions ACP du Pacifique, de la SADC et du Cameroun prévoient de manière explicite que la compensation peut comprendre ou être une indemnisation financière, bien que tous spécifient que ceci n’oblige pas le défendeur à offrir une indemnisation financière. En outre, l’APE de la SADC stipule que si la SADC était la partie plaignante et affirmait que d’autres mesures de rétorsion porteraient gravement atteinte à son économie, l’UE devrait envisager de fournir une indemnisation financière. Ceci pourrait être interprété comme une revendication du TSD par la SADC.
Rompant de manière peut-être plus flexible avec le système de règlement des différends de l’OMC, les dispositions du règlement des différends des APE prévoient des ‘mesures appropriées’ au lieu de la suspension des concessions. Si elle offre une plus grande diversité de mesures de rétorsion que celles énoncées dans la suspension des concessions de l’OMC, cette terminologie est asymétrique. Ceci veut dire que l’UE se réserve le droit d’y avoir également recours. Cette symétrie la rend vulnérable à la manipulation et réduit l’avantage économique des pays ACP. Par exemple, certains pays ACP se méfient du fait que l’UE pourrait recourir à cette clause eu égard à l’aide au développement, qui est cruciale pour les pays ACP, mais qui n’est pas une question commerciale (c’est-à-dire qu’elle ne constitue pas un engagement juridiquement contraignant au titre des APE). Afin d’empêcher une telle interprétation opportuniste, l’APE du Ghana proscrit de manière explicite l’aide au développement de la définition des mesures appropriées.
La plupart des APE contiennent d’autres dispositions qui imposent des disciplines sur le recours à des mesures appropriées, tant pour l’UE que pour les pays ACP. Á cet égard, tous les APE exigent des parties qui prennent des mesures de rétorsion qu’elles prennent en considération les répercussions économiques de leurs actions sur la partie perdante, les pays ACP de l’APE du Pacifique allant jusqu’à stipuler la prise en considération des répercussions sur le développement et sur l’économie :
Compte tenu du fait qu’il est difficile, voire impossible, pour la plupart des pays ACP de suspendre des concessions vis-à-vis de l’UE, et à plus forte raison, de nuire à l’UE, la flexibilité additionnelle offerte par le recours au terme ‘mesures appropriées’ peut être appréciable. Cette flexibilité donnerait aux pays ACP l’opportunité de disposer d’un arsenal plus riche de mesures de rétorsion. (Karli, 2008, 25)