Communication : du décret de 1991 au décret de 2012 sur le conseil national de la communication

Le Conseil National de la Communication du Cameroun (CNC) a organisé les 13 et 14 septembre 2012 au Palais des Congrès de Yaoundé un séminaire atelier sur le thème « Enjeux et défis de la régulation dans le secteur de la communication au Cameroun », avec en toile de fond l’adoption du Décret No 2012/038 du 23 janvier 2012 portant réorganisation de cette institution qui a remplacé le Décret No 91/287 du 21 juin 1991. La lecture et l’analyse de ces deux textes laisse entrevoir des évolutions, des changements et des nouveautés dans le fonctionnement de cette institution en particulier et dans le secteur de la régulation de la communication au Cameroun en général.

De façon générale, si l’on peut affirmer que l’adoption et l’entrée en vigueur du décret  No 2012/038 du 23 janvier 2012 permet au Conseil National de la Communication de disposer de pouvoirs renforcés et plus étendus en matière de régulation de la Communication au Cameroun, il devient important de s’appesantir en profondeur  sur les changements apportés par ce texte par rapport à sa devancière.

L’amélioration du statut du Conseil

Le premier grand changement que nous pouvons relever d’un texte à l’autre est que le CNC n’est plus simplement un organe consultatif comme dans le décret de 1992, mais, il dispose désormais d’un pouvoir de régulation. En effet, nous pouvons lire à l’article 2 (1) du décret de 2012 que « Le Conseil est un organe de régulation et de consultation » alors que dans le texte de 1991, il est mentionné que « Le Conseil National de la Communication est un organe consultatif placé auprès du Premier Ministre, chef du Gouvernement en vue d'assister les pouvoirs publics dans l'élaboration, la mise en œuvre et le suivi de la politique nationale de communication ». Ainsi, en plus de son rôle qui lui a été attribué dans le texte de 1991, il est aussi chargé, au terme de l’article 3 (2) du décret de 2012, de veiller «au  respect de la liberté de communication sociale, conformément à la Constitution, aux lois et règlements en vigueur ».

Même si le Conseil est toujours placé auprès du Premier Ministre, chef du Gouvernement, il dispose désormais, au terme de l’article 2 (2), « de la personnalité juridique et de l’autonomie financière ». Ce qui devrait lui garantir une autonomie statutaire et fonctionnelle.

Le renforcement des attributions du CNC

Ensuite, en ce qui concerne les attributions du Conseil, force est de relever que ce dernier a désormais le pouvoir de prendre des décisions. Au travers de ses décisions, le conseil veille au respect entre autres « des lois et règlements en matière de communication sociale ; de l’éthique et de la déontologie professionnelles ; de la paix sociale, de l’unité e de l’intégration nationales dans tous les médias ; de la promotion des langues et cultures nationales dans tous les médias ; de la protection de la dignité des personnes, notamment de l’enfance et de la jeunesse dans les médias ; de l’égalité d’accès aux médias, notamment en période électorale ; de la liberté et de la responsabilité des médias… » . Dans le précédent texte, ces points ne pouvaient faire l’objet que de recommandations de la part du Conseil.

Il émet aussi des avis soit conformes notamment sur « les dossiers de demande de licences de créations et d’exploitation des entreprises privées de communication audiovisuelle ; et sur les rapports du gouvernement relatifs à l’assignation des fréquences audiovisuelles » (article 4 (2) du décret de 2012) ; soit simples sur les matières sur lesquelles il prend des décisions.L’émission des avis conformes apparait dans ce texte comme une innovation dans la mesure où le conseil ne pouvait jusqu’ici qu’émettre de simples avis.

De même, le Conseil, à la lecture de l’article peut, « d’initiative, faire des recommandations sur toutes les matières relevant de sa compétence ». En plus, selon l’article 4 (4) du décret de 2012, « le Conseil National de la Communication est consulté avant tout recours contentieux relatif au refus ou au retrait de la carte de presse », et plus seulement pour le recours judiciaire comme dans la précédente disposition.

De plus, la compétence du CNC est élargie par l’article 5 à « toutes les autres questions relevant du domaine de la communication sociale ».

La reconnaissance d’un pouvoir de sanction

En vue d’exercer ces différentes attributions, le CNC dispose désormais d’une palette de sanctions allant de l’avertissement à la suspension d’activité pour une période n’excédant pas six (06) mois, voire l’interdiction définitive d’activités. Selon l’article 6 du décret de 2012 in fine, ces sanctions sont susceptibles de recours dans les conditions et selon les modalités fixées par les lois et règlements en vigueur. Ce pouvoir de sanction, qui n’existait pas dans le précédent texte, fait véritable passer le CNC d’organe consultatif à un organe véritablement capable de réguler la communication au Cameroun.

Evolution dans l’organisation

Par ailleurs, un autre changement notable est celui de l’organisation du CNC. En effet, les dispositions du décret No 91/987 prévoyaientque le CNC serait constitué de membres titulaires et de membres suppléants. Les membres titulaires étaient une personne nommée, le président, et 18 membres qui sont élus ou qui, nommés par décret du Président de la République, représentent certaines administrations et organisations sociale, féminine et religieuse. Les membres suppléants étaient eux aussi soit nommés soit élus, et étaient appelés à remplacer les membres titulaires en cas de défaillance de ceux-ci. Mais, le décret de 2012 a substantiellement réduit le nombre et changé la désignation des membres du CNC dans la mesure où ceux-ci désormais au nombre de neuf (09), dont un Président et un vice-président, et sont tous nommés par un décret du Président de la République. La seule précision apportée par l’article 7 (3) est que les membres sont « choisis parmi les personnalités de nationalité camerounaise, reconnues pour leur intégrité, leur rectitude morale et leur expertise dans le domaine de la communication sociale ».

En ce qui concerne la durée des mandats, si celle du président reste de trois (03) ans dans les deux textes, celle des autres membres passe de six (06) ans renouvelable au un tiers à 03 ans renouvelable une fois. Le décret No 2012/038 a aussi prévu les cas de remplacement d’un membre en cas de vacance. Il s’agit des cas de décès, de démission ou toute autre circonstance. L’article 9 (1) de ce texte ajoute qu’« en cas de faute lourde dûment constatée par le Conseil, il est mis fin au mandat du membre concerné par décret du Président de la République à la diligence du Président du Conseil ».

L’amélioration du fonctionnement

Pour ce qui est du fonctionnement du Conseil, il appert à la lecture des deux textes que les membres du conseil se réunissent sur la base de sessions soit ordinaires soit extraordinaires. Le Conseil se réunit désormais en session ordinaire 01 fois par trimestre sur convocation de son Président, soit quatre (04) sessions par an au lieu des 02 sessions qui étaient prévues dans l’ancienne disposition. Les sessions extraordinaires ne sont plus convoquées uniquement à la demande du Ministre de la Communication ou de ¾ des membres mais, à la demande soit du président du Conseil ou de 2/3 des membres, soit du Ministre de la Communication.Le décret de 2012 rend le fonctionnement du CNC permanent en période de campagne  électorale « afin de veiller au respect des lois, au principe de l’accès égal ou équitable des partis politiques, des candidats ou de leurs représentants aux médias publics » (Article 11 alinéa 1).

Selon le nouveau texte, les délibérations du Conseil sont valables si le quorum de 2/3 des membres présents ou représentés est atteint, au lieu de ¾ prévus par le passé. Au terme de l’article 13 du décret de 2012,«(…) Lorsque ce quorum n’est pas atteint, à la première convocation, celui-ci est ramené à la moitié des membres du Conseil lors des convocations suivantes. (2) Les décisions du CNC sont prises par consensus ou à la majorité simple des membres présents ou valablement représentés (…) ».

Pour ce qui est des rapports que le Conseil adresse au Premier ministre, même s’il demeure que le CNC doit rédiger un rapport général chaque année sur l’exécution de ses missions et l’état de la communication sociale au Cameroun, le nouveau texte ajoute que chaque session et sanctionné par la rédaction d’un rapport à transmettre au Premier ministre.

Le texte de 2012 fait également une précision sur le rôle du président du Conseil qui, au terme de l’article 15, « représente le Conseil dans tous les actes de la vie civile et en justice. Il assure la direction du Conseil ». Le vice-président le remplace en cas d’empêchement ; mais si l’empêchement excède un délai de 6 mois, le président de la République procède au remplacement du Président du Conseil, à la diligence du Premier ministre (alinéa 3 du même article).

Le Conseil est, dans son fonctionnement, pourvu d’un Secrétariat général dont le Secrétaire Général est nommé par le Président de la République, ce qui apparait comme une nouveauté par rapport au texte de 1991.

L’institution d’un budget et d’une comptabilité

En outre, en ce qui concerne ses ressources, le CNC fonctionne désormais, selon le décret de 2012, sous fond des deniers publics selon les règles de la comptabilité publique. Le budget du Conseil est équilibré en recettes et en dépenses et est inscrit au budget des Services du Premier ministre. L’ordonnateur principal de ce budget est le Président du Conseil et l’ordonnateur délégué peut être le Secrétaire Général  après désignation du président du Conseil.  Cette autonomie financière et budgétaire ainsi reconnue au CNC depuis le décret de 2012 apparait comme une grande avancée pour le fonctionnement même de cette institution. Il apparait de ce fait que les contributions par  les organes et entreprises de communication sociale, organisations syndicales ou professionnelles, imprimeurs et distributeurs de presse et de communication audiovisuelle qui était prévues par le précédent texte en tant que ressources du CNC ont disparu.

La comptabilité du CNC est, à la faveur du texte de 2012 tenu par un agent comptable désigné par le ministre chargé des Finances. Ce dernier y nomme également un contrôleur financier. Ces deux agents « présentent au Conseil leur rapport sur l’exécution du budget du Conseil » (Article 27). Ces dispositions comptables et financières n’étaient pas prévues dans le précédent texte, et donc apparaissent comme des nouveautés dans le fonctionnement de l’institution de régulation de la communication au Cameroun.

L’attribution d’une allocation au président, vice-président et au secrétaire général

Enfin, il est prévu une allocation mensuelle allouée au Président et au Vice-président ainsi que des avantages particuliers. Les autres membres, comme dans l’ancien texte, exercent des fonctions gratuites et ne bénéficient que des indemnités de session. Leurs frais de transport et de séjour sont en effet pris en charge à l’occasion des sessions.

Au total, la lecture du décret No 2012/038 du 23 janvier 2012 laisse transparaître quelques similitudes mais aussi et surtout beaucoup de différences voire évolutions par rapport à sa devancière de 1991. Au final, c’est le CNC qui en sort renforcé même si des améliorations sont encore envisageables. Il ne reste plus à l’organe de régulation de désormais pleinement jouer son rôle.

Ranèce Jovial NdjeudjaPetkeu et Willy Zogo

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