Municipales et législatives 2013 : Contentieux préélectoral

Avant le lancement de la campagne du premier double scrutin organisé par Elecam, il y a eu le dépôt des listes candidates à l’issue duquel plus de 300 requêtes ont été déposées aux greffes de la Cour Suprême siégeant tantôt comme  Conseil Constitutionnel,  tantôt comme juge administratif. Dans l’ensemble, les décisions sont variées et diverses …

Tout à commencé  bien avant l’annonce par le conseil électoral, Elecam des listes de candidatures déposées et retenues pour la course aux élections du 30 septembre prochain. Le  mercredi 31 juillet 2013, la Chambre administrative de la Cour suprême (CS) commençait déjà à dire le droit sur les requêtes formulées par les partis politiques ou leurs  membres et adhérents à l’encontre des décisions futures d’Elecam. Futures, parce qu’elles ne devaient intervenir que le 01er août 2013.

D’abord, 07 recours pour les municipales

C’est dans l’esprit de contestation anticipée des listes à publier par Elecam, que sur  les  07 requêtes qui  ont été introduites au greffe de la Chambre administrative de la Cour Suprême du Cameroun,  04 ont été déclarées irrecevables par le collège de trois juges de ladite Chambre  dont le président M. Clément Atangana, qui a siégé vers 10h et demi, ce 31 juillet-là. Derrière les  requêtes déclarées irrecevables étaient cornaquées par trois partis politiques. Il s’agissait notamment du  Rassemblement démocratique du Peuple Camerounais (Rdpc), parti dont les recours ont été introduits par un groupe d’électeurs de la commune de Djoum, ainsi que  par le maire sortant de la commune de Nguelmendouga, M. Jean Claude Tsinya Abanda.  A côté du parti au pouvoir,  les recours du Social Democratic Front (Sdf) introduits par le Dr Aloys Parfait Mbvoum Mbvoum, tête de liste de ce parti à Yaoundé IV et de M. Manfred Ngom intervenant sous la bannière de l’Union des Populations du Cameroun (Upc), ont connu le même sort.

Pour motiver sa décision, le collège de juges a convoqué l’article 189 du code électoral camerounais qui dispose que ,«  (1) la décision d’acceptation ou de rejet d’une  liste de candidats peut faire l’objet d’un recours devant la juridiction administrative compétente, par un candidat, le mandataire de la liste intéressée ou de toute autre liste, ou par tout électeur inscrit sur la liste électorale de la commune concernée.  (2) Les contestations ou  réclamations sont faites sur simple requête, dans un délai maximum de cinq (05) jours suivant la publication des listes de candidats. »

Suivant le paragraphe (2) de cette disposition du code électoral, les candidats en se portant parties à un recours contre Elecam, ignoraient l’obligation d’attendre la publication par ce conseil des listes de candidature.

Irrecevabilité de recours prématurés

C’est donc fort logiquement que les juges de la chambre administrative ont décidé le 31 juillet 2013 de déclarer  « irrecevables » pour saisine précoce, les 4 requêtes formulées pour la plupart contre Elecam. « Qui vous dit que les listes dont vous contesté déjà le rejet, ne seront pas reçues et acceptées après examen par Elecam. Tant que la liste n’est pas publiée, le juge administratif ne peut statuer », a expliqué le président de la chambre administrative aux conseils des requérants.

Dans la deuxième partie de la matinée du 31 juillet 2013, un autre requérant est passé devant le collège des trois juges de la chambre administrative de la Cour Suprême. Il s’agissait de l’Union des mouvements socialistes (Ums) de M. Pierre Kwemo. Deux heures de temps après la première audience qui s’est soldée par quatre décisions d’irrecevabilité, l’Ums entendait faire reconnaître et accepter  trois  de ses listes. Au final, le conseiller à la Chambre administrative, Emmanuel Sandeu, a rendu un verdict favorable aux trois recours en référé formulés par des militants de l’Ums. Les prétentions des militants de ce parti dans les localités de Bana, Bakou et Banwa tenaient du fait que, les listes de leurs candidats aux conseils municipaux de ces communes du Haut-Nkam n’ont pas pu être déposées, par la faute, ont –ils soutenus, des antennes communales d’Elecam. Selon le conseil de l’Ums, Me Antoine Mong, les agents d’Elecam ont exigé des mandats signés du président du parti  qui  autorisaient les candidats à postuler. Ce qui ne constituait guère une obligation légale. En faisant constater cette infraction à la loi, par un huissier de justice, l’Ums a constitué un procès verbal qui lui a servi devant le juge administratif. C’est cet acte authentique, qui  ne saurait être attaqué verbalement devant une cour qui a probablement donné, par sa force probante de poids, cette tournure favorable à la décision finale.

En effet, par leur décision du 31 juillet, les juges de la chambre administrative de la Cour Suprême ont fait obligation au directeur général d’Elecam d’enregistrer et de traiter ces candidatures de l’Ums.

Respectueux de cette décision, le Conseil électoral lors de la publication officielle des listes de candidatures aux municipales et législatives a accepté les trois listes de l’Ums dont l’examen a été ordonné auparavant par la Chambre administrative de la Cour suprême.  Cependant, à ce sujet,  le président Fonkam Samuel Azu’u a expliqué que, « les listes ont été reçues par la direction générale des Elections et nous les examinons parce que la Chambre administrative de la Cour suprême a ordonné que Elecam reçoive pour examen et c’est ce que nous faisons. Il y a eu une petite confusion dans l’esprit du public parce que les gens pensaient qu’on nous avait ordonné d’accepter ces listes, ce qui n’est pas le cas. »

Ensuite aux législatives, 74 recours devant le Conseil Constitutionnel

Dès les minutes qui ont suivi la publication par Elecam des listes de candidatures acceptées, le greffe de la Cour Suprême siègeant en lieu et place du Conseil Constitutionnel a littéralement été assiégé. Le greffier en chef près cette haute juridiction, M. Apollinaire Koé Amougou, a déclaré avoir reçu 74 recours en rapport avec les contestations des listes publiées. C’est le mardi, 13 août 2013 que la Cour suprême siégeant en lieu et place du Conseil Constitutionnel, a ouvert l’audience pour la clôturer le lendemain, 32 heures plus tard. Dans l’ensemble, c’est 28 recours qui ont été rejetés, 20  autres ont fait l’objet de désistement. Pour le reste, ils ont été déclarés  pour la plupart irrecevables. Cependant, il y a eu des recours validés par la haute juridiction.

Le principal motif des rejets a été le défaut de qualité  à se porter requérant en contestation des listes de candidatures rendues publiques Elecam.

Pour les sages du Conseil Constitutionnel, en tête desquels le Premier président, M. Alexis Dipanda Mouelle, l’interprétation de l’article 129 du code électoral ne peut souffrir d’aucune extension. Cet article dispose que : « les contestations ou les réclamations relatives au rejet ou à l’acceptation des candidatures, ainsi que celles relatives à la couleur, au sigle ou au symbole adoptés par un candidat sont soumises à l’examen du Conseil Constitutionnel par tout candidat, tout parti politique ayant pris part à l’élection ou toute personne ayant qualité d’agent  du Gouvernement pour ladite élection, dans un délai maximum de deux (02) jours suivant la publication des candidatures. » .

Il n’y a ainsi que les candidats qui ont été investis ou élus par leur parti politique  ou les représentants légaux des partis ou encore les personnes ayant la qualité d’agent du gouvernement qui étaient légitimes à déposer des requêtes devant la haute juridiction pour contester ou réclamer des droits. Ce qui n’était pas le cas de la plupart des prétendants aux recours.

Il est également arrivé que le Conseil constitutionnel se déclare incompétent dans certain cas. Il en été ainsi pour  la demande d’annulation totale de l’élection par le People Action’s Party (Pap) d’Ayah Paul Abine dans le Mayo Tsanaga.

Au rang des requêtes qui ont reçu un avis favorable des juges, trois formations politiques sont à citer. Il s’agit du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) du Pr Maurice Kamto, l’Alliance nationale pour la démocratie et le progrès (Andp) de M. Amadou Moustafa et le Bloc pour la reconstruction et l’indépendance économique du Cameroun (Bric) de M. Ernest Tchoffo.

En vertu de l’article 125 du code électoral, c’est  au Conseil Electoral qu’il revient d’accepter ou de déclarer irrecevable une candidature.  « La notification de la décision motivée de rejet d’une candidature est faite à l’intéressé par le Directeur Général des Elections. Une copie de ladite décision est immédiatement communiquée au Conseil Constitutionnel », précise cette disposition du code. Ainsi, pour le cas du Mrc de M. Maurice Kamto, les conseils ont demandé aux juges d’obliger Elecam à accepter les déclarations de candidatures pour les circonscriptions du Mfoundi, des Hauts-Plateaux, des Bamboutos et du Wouri-Est. Mais, selon le juge Alexis Dipanda Mouelle, il ne pouvait être question que d’obliger Elecam à accueillir les dossiers pour  examiner lui-même leur acceptabilité et non de l’obliger à les accepter comme conformes à  la norme.

Sur une toute autre base, le Conseil Constitutionnel fait droit aux requêtes en remplacement  des candidats de l’Andp et du Bric. Les juges s’opposaient ainsi à Elecam qui avait rejeté les listes de ces parties  pour le motif de défaut d’âge.

Le cas de M. Wourlina Kampete, candidat du Rdpc dans la  circonscription du Mayo-Danay Est a connu un dénouement semblable. A  la suite d’une requête introduite par l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp), ce candidat a été  jugé inéligible par le Conseil constitutionnel parce qu’il tombait sous le coup d’une condamnation par les tribunaux. Le juge a décidé que la liste ne pouvait souffrir dans son ensemble et qu’un remplacement par un camarade était de mise.

Et enfin, aux municipales 269 recours encore

Il était connu que les contestations à l’encontre des listes de candidatures aux élections municipales publiées par Elecam étaient loin d’être épuisées. Pourtant, l’on ne les imaginait guère encore aussi nombreuses jusqu’à ce que s’ouvre l’audience spéciale de la Chambre administrative de la Cour suprême au matin du 19 août. Au rôle de ladite chambre, 269 affaires répertoriées.

Au bout d’une audience qui a duré trois jours, les désistements ont été légion, les décisions d’irrecevabilité aussi, mais quelques avis favorables de la Chambre à la tête de laquelle siège le président, M. Clément Atangana. C’est dans ce contexte d’audience-fleuve que trois recours ont été déposées en vue de déclarer inéligible la liste du Rdpc que conduit la Maire sortante de la Commune de Banganté, Mme Célestine Ketcha Courtès, pour prendre l’un des cas les plus attendus. La Chambre administrative a donné gain de cause au Rdpc, malgré les prétentions des requérants qui excipaient la double nationalité de la mise en cause et la contrariété de cet état avec le code de la nationalité applicable au Cameroun depuis 1968.  En effet, le candidat Grebert Hottou de la liste du Sdf concurrente avait introduit deux recours en vue de déclarer « inéligible une candidate et une liste» des trois listes en lice dans cette commune en l'occurrence, celle du Rdpc. Ce candidat Sdf reprochait au maire sortant « d'avoir une nationalité à la fois française et camerounaise». Un autre grief  a était soulevé contre la maire sortante, l’avocat du Sdf, Me Joseph Lavoisier Tsapo a tenu a souligner que :« Mme Ketcha serait sous le coup d'une condamnation et que de fait, elle ne pourrait pas aller aux prochaines consultations».

L’insuccès à frappé nombre d’autres recours au motif relevé par les juges que les requêtes étaient fondées sur des problèmes internes aux différentes formations politiques. Face à cette invite à l’immixtion dans le fonctionnement intrinsèque des partis qui sont avant tout des associations privées, les juges ont décliné leur compétence.

Dans l’ensemble

Les acteurs du contentieux sont sortis du prétoire de la Cour suprême avec des sentiments et des opinions épars. Pour le parti au pouvoir, la tendance globale était à la satisfaction. Comme l’affirmé son secrétaire général adjoint du Comité central M. Grégoire Owona en commentant la dernière affaire, celle n° 197 au rôle, « au final, notre parti sera le seul à être présent en compétition dans les 359 communes sur les 360 existantes ». Pour le sénateur, Etienne Sonkin qui brigue la mairie de Dschang, certaines affaires ont témoigné de la partialité des juges. Aux sortir du prétoire, il a déclaré: « je suis globalement déçu. Nous nous sommes désisté parce que la jurisprudence a été établie par la Chambre administrative qui est contraire à la loi ».

On aura tout de même retenu de ce contentieux préélectoral que, certaines dispositions du code électoral ont mis en difficultés l’office d’interprétation des juges. Tel est le cas des notions de « composantes sociologiques »  ou de « genre » qui ont connu des appréhensions hétérogènes selon que le juge prestait en Chambre administrative ou en Conseil Constitutionnel.

W. S. Z

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