LA REVISION EN QUESTION

M. Samuel EBIA NDONGO

« Le processus de révision se poursuit »

 

Le directeur des Forêts au ministère des Forêts et de la faune s’exprime sur l’état d’avancement  des travaux de relecture de la loi de 1994.

 

2004, la loi de 1994 portant régime des forêts,  la faune et  la pêche est en cours de révision. Quelles sont les raisons qui militent  en faveur de cette réforme ?

Je voudrais relever que la loi 94/01 du 20 janvier 1994 est une œuvre humaine et aucune  œuvre humaine n’est jamais parfaite. A sa mise en application, très rapidement il a été noté  de  vides juridiques, singulièrement pour ce qui est de l’application des dispositions relatives aux contrôles forestiers.

Parallèlement, dans sa mise en œuvre, il a été élaboré des outils pour son application. Pendant l’élaboration de ces documents, le comité technique mis en œuvre dans le cadre de la révision de cette loi s’est aperçu  que certaines dispositions n’étaient pas clairement énoncées. Vous comprenez donc les mobiles de la révision. Plusieurs points méritent donc d’être revus. Cette loi qui a 16 ans a été éprouvée par le temps et par  des réalités liées à son application.

 

Mais à partir du moment où vous avez opté  pour une révision cela veut dire qu’il y a des enjeux nouveaux, quels sont-ils ? Et quels pourraient être les contours et les principales innovations ?

On ne peut pas parler d’innovations en tant que telles, mais il y a des axes stratégiques sur lesquels va porter la révision de la loi.  Dans les détails,  et au regard du caractère   multi acteur de la concertation, de  multiples critiques ont été émises et dans tous les sens. Les fondements mêmes de la politique qui a induit l’élaboration de cette loi ont été touchés. Mais nous avions quelques axes stratégiques qui sont celui de l’élaboration des plans d’aménagement des forêts dont il faut réviser des concepts.

 

Quels sont ces concepts ?

Les notions de base pour l’élaboration des plans d’aménagement. Je vous ai dit au départ, qu’à partir de la loi, il a fallu aussi élaborer des outils, à l’instar de l’arrêté 222 qui porte sur  les procédures  d’élaboration du suivi et des contrôles  des plans d’aménagement dont on s’est rendu compte à l’application qu’elle comportait  de limites qui remettaient même en cause les aménagements forestiers.

On peut citer l’introduction des outils électroniques informatiques, qu’il faut bien pouvoir prendre en compte dans le cadre du contrôle.  Nous avons le contrôle forestier en rapport avec les problèmes de transactions forestières. On peut donc énumérer tout un tas de dispositions réglementaires qui, non appliquées, ne se retrouvent pas sanctionnées au niveau de la répression.

En termes d’innovations, le comité  de réforme planche sur certains axes tels que : la donne des changements climatiques avec le rôle de la forêt dans la protection de la couche d’ozone, des dispositions à prendre par rapport à la fiscalisation des services  environnementaux. Des axes déjà tout tracés. Il y a également la prise en compte des droits des populations par rapport à la gestion forestière, notamment avec la problématique de la tenure foncière, les droits fonciers  qui sont un problème d’actualité avec notamment  le problème de reboisement. Quand vous plantez les arbres par rapport à la situation du terrain, comment la forêt, qui en est issue, vous appartient-elle ? Parce que les dispositions de la loi là-dessus sont un peu strictes. Il faut d’abord justifier de la détention du terrain, avant de justifier de la propriété du terrain.

 

Quelle est l’approche qui a été mise en place  pour la révision d’une loi qui fait tant de débats et suscite tant de passions?

Un comité technique a été mis sur pied. Celui-ci procédera au recrutement d’un bureau d’étude dont le travail sera sanctionné par un comité interministériel composé de tous les ministères qui ont une interférence dans la gestion forestière à savoir, le ministère en charge du Plan, le ministère en charge des Domaines et des Affaires foncières (Mindaf),  celui en charge des Finances (Minfi),   le ministère du Commerce, le ministère en charge des Forêts et de la Faune (Minfof) lui-même, le ministère de  l’Environnement et  de la Protection de la Nature (Minep) ainsi que  tous les autres partenaires, notamment  les ONG du secteur  forêt et environnement,  le secteur privé. Nous avons associé l’Assemblée Nationale à travers sa structure le (Réseau des Parlementaires,  (REPAR), le Mindaf aura son mot à dire quand on parlera de la question foncière.

 

Et les populations  riveraines ne sont-elles pas concernées?

Je n’ai pas déroulé tout le processus de réalisation. Nous avons un comité technique de suivi du processus de révision de la loi qui a en son sein un secrétariat technique, lequel secrétariat  technique est constitué par l’administration des Forêts, dont le Directeur des Forêts  en assure la présidence avec un point focal,  mais également toutes les directions techniques, principalement, la direction de la  Faune, la direction de la Transformation et de la Promotion du Bois. Le secrétariat  technique est chargé de centraliser, de suivre  les travaux  tels qu’ils vont se dérouler sur le terrain en termes d’ingénieur de marchés. C’est  le bureau d’Etudes en cours de recrutement qui en principe, planchera sur l’élaboration du texte de loi, du décret d’application et de l’exposé des motifs. C’est ce travail qui sera soumis à l’appréciation du comité technique qui devra le valider et qui assurera la transmission des différents documents au ministère en charge des Forêts. Mais l’examen de la loi  elle-même va se  faire de manière thématique.

On a donc identifié quelques thèmes. Chaque thème est attribué à un leader thématique.  On peut citer par exemple le contrôle, la gestion de la RFA et la gouvernance pour ne citer que ceux là. Ce dernier thème sera conduit par le REPAR. Le Minfof lui-même conduit la réflexion à travers des fora.  Chaque région va organiser un forum au cours duquel, les chefs traditionnels, les ONG représentées dans la localité, ainsi que les autorités administratives et les différentes délégations régionales concernées seront invités.  Les débats porteront sur  tout le code forestier,  les problèmes de leur région respective et de ceux  de neuf autres régions pour leur apport dans la révision de la loi. C’est la première étape. Ensuite, chaque leader thématique  va bâtir son TDR (Terme de référence) expliquant comment il va conduire les consultations pour son thème. La révision de la loi dispose d’un grand  TDR et chaque délégué régional, pour son forum, rédigera un TDR qui doit être en droite ligne du grand TDR.  Chaque leader thématique pourra en outre diviser le Cameroun en quatre ou cinq grandes régions, identifier les personnes à consulter, faire sa consultation et élaborer un rapport qu’il va transmettre aux consultants.  Le consultant assiste à toutes ces consultations et prend des notes. Il reçoit également les rapports de toutes ces consultations. Le secrétariat technique à son niveau, assiste le consultant lors de ces travaux. Toutes les parties prenantes devront, en principe, être consultées. Au sein du comité technique qui est la structure centrale, figurent les ONG qui relèvent de la société civile, deux parlementaires. Nous avons prévu deux places pour les représentations  des populations autochtones. Cela signifie que le comité ira à l’Est pour chercher une association Baka , la plus importante, et nous prendrons son président et non une ONG qui parle au nom des Pygmées. Il faut que les gens viennent exprimer  eux-mêmes leurs préoccupations.

 

Quels sont vos partenaires actuels impliqués dans le processus de révision de la loi. En 1994,  la Banque mondiale était impliquée semble t-il?

Aujourd’hui le secrétariat général  est le pilote  premier de  ce processus que seconde le directeur des Forêts. C’est un processus qui est propre à l’administration des Forêts et dans le comité technique, nos partenaires qu’on ne peut mettre de côté sont représentés au travers de ce qu’ils appellent le Cercle des partenaires du Minfof. Nos partenaires, comme toutes les parties prenantes dans la gestion du secteur Forêt sont représentés, vous les connaissez sans doute.

 

Nous savons que la loi de 94 en dehors de l’aspect Forêt et Faune avait d’autres composantes, telle la pêche. Est-ce que, dans le cadre du processus qui va conduire à cette  révision, vous avez pris en compte les spécificités de la sous composante pêche?

Si vous regardez bien la loi, elle regroupe les trois composantes, mais à l’intérieur, elles  sont bien spécifiées. Il n y a pas beaucoup d’interférence en tant que tel. Le problème qui se pose ici est que, dans la gestion sectorielle, nous sommes partis  d’une conception forêt, faune et pêche. Les premières conceptions  institutionnelles mettaient  la Forêt, la faune et pêche dans un même package.  La Pêche ayant rejoint  le ministère de l’Elevage. Les Forêts et la Faune ayant rejoint le ministère de l’Agriculture. Mais étant entendu qu’on se reconnaissait dans le même corps, nous avons élaboré une loi commune avec les experts de la forêt, les experts de la faune  et les experts de la pêche.  Pour cette révision, la pêche est représentée au niveau du comité technique. Nous avons par ailleurs fait une correspondance au Ministère de la Pêche, qui lui aussi est en train de mener un processus de révision, pour savoir si nous repartons ensemble  comme cela a toujours été par le passé ou si nos chemins se séparent ? Nous attendons, lors de la reprise des travaux, d’avoir une réponse concrète.  Mais nous les avons déjà saisis. Nous avons programmé une réunion au niveau des  secrétariats généraux pour pouvoir harmoniser les positions.

Et au niveau de l’Environnement c’est le même processus ?

Au niveau de l’environnement, ce n’est pas le même processus. Ils ont mis en place la loi-cadre avec ses textes subséquents. Ils font partie du comité technique pour faire prendre en compte les dispositions de cette loi-cadre dans la révision de la loi. Parce que la loi cadre est venue après la loi de1994. Ce qui nous amène donc à ce qu’on puisse harmoniser pour qu’il n y ait pas de contradictions entre les lois. Le Minep fait également  partie du comité technique.

Quel est l’état d’avancement du processus conduisant à la révision ?

Il y a un aspect qu’on a oublié  de relever, c’est qu’en termes de sémantique, il y a eu beaucoup de débats. Est-ce qu’on révise ? Est-ce qu’on relit, est-ce qu’on modifie ? On s’est donc accordé en fin de compte sur la terminologie " relecture ".  Par ailleurs, au regard des points stratégiques à relire, on s’est dit qu’il y aurait sans nul doute des impacts sur la politique forestière elle-même, et c’est pour cela que nous avons étendu  le processus au niveau de la politique. Nous parlons de la "relecture de la politique et de la loi forestière" pour être en cohérence.  Le processus de révision de la loi se poursuit effectivement. Nous accusons un retard dû aux questions de financement. La source de financement qui avait été identifiée n’a pas fonctionné en 2009. Résultat, les activités ont fonctionné au ralenti. Mais étant des leaders thématiques, nos partenaires ont poursuivi leurs activités nonobstant cet handicap qui a plus touché les activités à mener par le MINFOF. Et nous avons  principalement le volet produits forestiers non ligneux où nous avons reçu des directives de la Comifac (Commission des forêts de l’Afrique centrale) qui a élaboré des directives pour la gestion des produits forestiers non ligneux. Cette thématique est conduite par la FAO qui est en ce  moment sur le terrain, dans le cadre de la concertation des différentes parties prenantes.

 

Propos recueillis par E. N. S.

& Marius Nguimbous

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