PERSPECTIVES

DR NTONGA BOMBA

« Les changements climatiques ont des effets néfastes sur la biodiversité »

Spécialiste du Droit de l’environnement, le DR Serge Vincent Ntonga Bomba explique les avancées notables apportées par la loi réformée de 1994 en matière de protection de l’environnement, d’exploitation rationnelle des ressources naturelles. Un arrimage à la  nouvelle donne internationale.

 

Qu’est-ce que la biodiversité ?

A la question de définir la biodiversité camerounaise, il convient tout d’abord de souligner que la biodiversité est un domaine  assez complexe, c’est l’ensemble des organismes vivants, des écosystèmes terrestres, marins, et aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie, y compris la diversité au sein des espèces et entre les espèces, ainsi que  celles des écosystèmes. Peut-on savoir les différentes espèces qui existent sur notre planète, dans les différents biotopes que constituent les forets camerounaises tropicales, les zones humides, les mangroves, les steppes arbustives du grand Nord, et les récifs coralliens des fons marins inexplorés des zones côtières du pays ?

On n’en connaît qu’un maximum de deux (2) millions, alors qu’il y a une trentaine d’années, la diversité biologique était estimée à quinze (15) millions d’espèces et aujourd’hui,  elle est estimée à cinquante (50) millions, et certains avancent même le chiffre de quatre vingt (80) à cent (100) millions d’espèces différentes sur la planète. En matière de biodiversité, le Cameroun compte une variété de faune et de flore dont certaines espèces endémiques. Non seulement on ignore le nombre des espèces, mais aussi, on ignore leurs fonctions dans les écosystèmes.

Cette ignorance même constitue un des motifs qui justifient la conservation de la diversité biologique. Certes, les seuils des populations à préserver sont essentiels mais difficiles à déterminer ; la question de savoir s’il faut à tout prix conserver toutes les espèces divise les écologistes en l’absence de réponse scientifique sûre et fiable. Reste que, parmi les espèces connues, il y en a qui sont menacées et en voie de disparition. Le droit,  et notamment le droit de l’environnement s’efforce de préserver les unes en réglementant l’accès en vue d’une meilleure connaissance scientifique, et de protéger les autres d’une extinction définitive (d’où l’adoption par exemple de la loi sectorielle de 1994 sur les forêts, la faune et la pêche et l’adhésion du pays à certaines conventions internationales telles que la CITES et la Convention de Ramsar qui protègent la biodiversité et l’environnement.

En définitive, sur cette première question sur la biodiversité camerounaise, elle peut s’apprécier tant au niveau de la faune, de la flore, des espèces menacées d’extinction qu’au niveau de l’exploitation forestières et des espèces non ligneuses.

 

Qu’est-ce la protection de l’environnement ?

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le terme « environnement » demeure une quête d’une définition juridique universellement partagée. Ce mot en langue française exprime le fait d’environner, c’est-à-dire d’entourer ; c’est aussi là où nous vivons tous. La loi  n° 96/12 du 05 août 1996 définit l’environnement comme un ensemble des éléments naturels et artificiels ainsi que les facteurs sociaux, économiques et culturels, dont les interactions conditionnent le bien-être de l’Homme. La protection de l’environnement serait donc l’ensemble des mesures et mécanismes mis en œuvre pour la sauvegarde et la garantie de l’environnement.

 

Définissez le droit de l’Environnement et son impact sur  la protection de l’environnement?

Le rôle du droit de la protection de l’environnement est primordial et il est devenu le moteur des politiques environnementales. Le droit est l’ensemble des prescriptions prohibitives ou permissives qui concourent  à la protection de l’environnement. Et le droit de l’environnement peut se définir comme l’ensemble des règles juridiques tendant à supprimer ou à limiter les atteintes à l’environnement, c’est-à-dire, un ensemble de règles juridiques dont l’objet est la protection de l’environnement. Ce droit vise trois objectifs principaux à savoir : protéger le bien-être et la santé de l’Homme ; assurer une gestion rationnelle des ressources naturelles ; protéger l’environnement.

L’élaboration, la coordination et le financement des politiques incombent à l’Etat qui, à travers le gouvernement (ministères des Forets et de la faune et le ministère de l’Environnement et de la protection de la nature en ce qui concerne le volet environnemental). Il faut tout d’abord préciser que c’est le chef de l’exécutif, le président de la République qui définit la politique nationale de l’environnement. Sa mise en œuvre incombe au gouvernement (Minep) qui l’applique de concert avec les collectivités territoriales décentralisées (régions, communes,  communautés urbaines),  les  communautés de base et les associations de défense de l’environnement.

La participation active du Cameroun à toutes les conférences des Nations unies sur l’environnement marque une réelle prise de conscience des autorités de ce pays à protéger l’environnement et à initier une gestion rationnelle des ressources naturelles.

Cette volonté politique des autorités camerounaises s’est manifestée par la création d’un cadre institutionnel et juridique adéquat et par l’adoption de nombreux outils, instruments et techniques de planification environnementale. Ainsi, par exemple dès janvier 2004, l’ex-ministère de l’Environnement et des Forêts (Minef) a élaboré avec l’appui des partenaires techniques et financiers au développement un Programme sectoriel Forêt Environnement (PSFE) qui est toujours en cours d’exécution. L’objectif  de ce programme est la mise en place d’un cadre cohérent pour toutes les interventions qui concourent à la réalisation des objectifs de la politique forestière, faunique et environnementale du pays. Il s’agit d’un programme national de développement sectoriel, multipartenaires, ouvert aux contributions de la société civile, des ONG et des populations et qui intègrent les enjeux des nouvelles initiatives telles que le Document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP), l’initiative des Pays pauvres très endettés (PPTE) et les programmes de bonne gouvernance.

Concernant le ministère des Forêts et de la Faune (Minfof), il convient de signaler l’Accord  de Partenariat Volontaire (APV) conclu entre le Minfof au début du mois de mai 2010  et l’Union européenne (UE). Cet accord vise l’instauration d’une gestion rationnelle de nos forêts en réduisant leur exploitation anarchique et illégale  et en améliorant le label du bois camerounais exporté entres autres.

 

Décrypter la politique environnementale du Cameroun à la lumière de la loi de 1994 (innovations et avancées)…

Au  Cameroun, la gestion rationnelle des ressources forestières passe par le respect rigoureux de la loi 94-01 du 20 janvier 1994 portant régime des forêts, de la faune et de la pêche et tous les décrets d’application, par l’amélioration de ces textes et par le contrôle administratif efficace de toutes les procédures relatives à l’exploitation de nos forêts.

Par ailleurs, n’oublions pas que les changements climatiques ont des effets néfastes sur la diversité biologique. Ainsi, par exemple une sécheresse prolongée pourrait faire disparaître certaines espèces animales ou végétales de la même manière que l’abondance des pluies. Le Cameroun a donc intérêt à utiliser les modes de développement propres en réduisant l’ »utilisation des gaz à effets de serre qui détruisent la couche d’ozone et provoquent le réchauffement de la terre.

Le Cameroun possède d’abondantes richesses naturelles, une grande biodiversité et d’immenses paysages encore intacts. Nous devons nous sentir responsables de la beauté de nos villes, de nos plages, de nos forets et de notre biodiversité. Chaque citoyen doit contribuer au maintien de ce patrimoine  en parfait état. Les politiques nationales et internationales en matière de protection de la nature s’appuient désormais  sur des  lois environnementales qui doivent non pas empêcher  le développement, mais bien au contraire le pérenniser par une gestion rationnelle, durable et responsable. Un projet de développement est inséparable de son environnement naturel et humain.

En définitive, la loi sectorielle de 1994 suscitée, si certaines de ses dispositions obsolètes sont actualisées et bien appliquées, peut intégrer harmonieusement les fonctions économiques, écologiques, sociales, et culturelles de l’environnement.

Rappelons que le droit de l’environnement a pour objet d’étudier les règles de droit qui fixent le cadre juridique général pour la gestion de l’environnement et de sa protection contre toute forme  de dégradation et d’assurer une exploitation rationnelle de ses ressources naturelles en vue d’un développement durable.

 

Comment peut-elle être mise en œuvre pour une gestion durable et équitable de nos forêts  dans un environnement où persistent des habitudes hostiles à la nature (abattage industriel, agriculture sur brûlis, recherche du bois de chauffe etc.)

Les politiques gouvernementales actuelles en matière de protection de l’environnement visent les objectifs ci-après : promouvoir la gestion saine de l’environnement et des ressources naturelles comme base de développement durable ; mettre en œuvre une gestion efficace de l’environnement sur la base des politiques et programme cohérent ; promouvoir la protection et la régénération de l’environnement en impliquant les populations à la base qui en dépendent ; promouvoir l’équité dans le cadre de la coopération internationale pour la protection et la conservation de l’environnement global.

En ce qui concerne la vie sauvage au Cameroun, c’est-à-dire les espèces animales et végétales, une bonne protection passe par trois méthodes de conservation de la faune et de la flore sauvages à savoir : la création de nouveaux aires protégés en luttant efficacement contre toute forme de braconnage, la protection des espèces en dehors des zones protégées et la règlementation des spécimens…

 

Propos recueillis par Emilienne N. Soué & M. N.

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