Ma terre à moi !
Aborder la question de la gestion foncière au Cameroun, serait comme s’attaquer aux Douze Travaux d’Hercule, tant la tâche n’est pas du tout aisée. Le législateur continue à grand renfort de textes aménagés et réaménagés depuis la période coloniale jusqu’à nos jours, de trouver le juste milieu entre notre culture foncière et la culture foncière occidentale. Par conséquent, le sujet mérite plus que notre attention: parce que la terre a toujours été une mamelle nourricière ; parce qu’elle a perpétuellement généré des conflits, décimant des familles entières; parce qu’il y a antagonisme entre le droit coutumier et le droit moderne; parce qu’il y a l’obligation de constituer la réserve héréditaire lorsqu’on fait des transactions immobilières ; parce qu’il faut rendre son droit opposable avant de vendre ; parce que nous sommes analphabètes de notre propre culture et des lois qui régissent la gestion foncière dans notre pays. La liste des ″parce que″ est très longue…
Tout le monde a raison et tout le monde a tort! D’un côté la législation avec sa logique de morcellement du bien commun pour en faire des propriétés privées (avec le titre foncier comme une garantie !) et de l’autre, la logique ancestrale de l’identification à la terre : quand on cède son terrain, c’est un peu son âme qu’on cède. Quand on en est dépossédé, c’est la disparition de sa généalogie, de sa culture, c’est la mort certaine. Que deviendrons-nous, si nous perdions nos villages, ces havres de paix qui sont pour nous autant de points de repères que de points d’ancrage ?
Toutefois, ″la loi est dure, mais c’est la loi″. Il revient donc au législateur de trouver des compromis intégrant dans la réglementation, des aspects géographiques, historiques, coutumiers, culturels, sociologiques etc., qui concourront à la pacification de la société.
Par Emilienne N. Soué