Le cinquantenaire de l’Ecole Nationale de l’Administration et de la Magistrature a été pour la rédaction du Droit une occasion idoine pour revisiter la profession de magistrat. En effet, l’ENAM est comme l’a d’ailleurs affirmé le chef de l’Etat, le Président Paul Biya, le socle sur lequel se construit l’avenir de l’administration publique au Cameroun. Et c’est dans cette institution que commence l’apprentissage de la bonne gouvernance. Bien que l’école ait ouvert ses portes à d’autres filières, il n’en demeure pas moins que la magistrature demeure le fleuron de la formation. Qu’est-ce que le magistrat professionnel ? Quelles sont les conditions d’accès à l’ENAM, quelles sont les missions et le profil d’un magistrat ? La rédaction de votre journal apportera des éclairages sur cette profession dans deux éditons successives.
ACCES A LA PROFESSION
On doit se référer au cadre institutionnel tel que le décret n° 95/048 du 8 mars 1995, modifié par celui n° 2 du 13 janvier 2004 portant statut de la magistrature pour définir le magistrat professionnel. Aux termes de l’article 11de ce décret : Nul ne peut être nommé magistrat s’il ne justifie outre des conditions requises par le statut général de la Fonction publique, du titre de maîtrise en droit d’une université camerounaise, d’un diplôme de l’Ecole Nationale d’Administration et de la Magistrature (division judiciaire section magistrature) ou d’un stage d’attaché de justice, d’une équivalence d’un diplôme d’une université étrangère. Ce qui veut dire, le statut général de la fonction publique et le concours de la fonction publique.
Une formation de deux ans à l’issue de laquelle, on obtient le diplôme de l’ENAM, un dossier d’intégration et le décret du chef de l’Etat.
Le diplôme de l’ENAM peut être remplacé par une expérience professionnelle acquise au Cameroun, postérieurement à la maîtrise en droit ou titre assimilé de cinq années en qualité d’avocat, de professeur agrégé des Facultés de droit, Huissier, greffier, administrateur de greffe ou Notaire lorsque la compétence et l’activité du candidat en matière juridique le qualifient pour l’exercice des fonctions juridiques. On peut donc définir le magistrat professionnel comme toute personne ayant suivi la formation exigée et exerçant au siège ou au parquet dans une juridiction, au Ministère de la Justice, ou dans un organisme où il est en détachement.
STATUT COMMUN AUX CORPS DES MAGISTRATS
Le Cameroun ne connaît pas une grande diversité de corps de magistrats. La grande distinction se fait ici entre les magistrats du siège et les magistrats du parquet auxquels on assimile ceux en service au ministère de la Justice et ceux en détachement.
Qu’ils soient du siège ou du parquet, en service au ministère de la Justice ou en détachement, les magistrats partagent un certain nombre de règles communes. Ces règles communes concernent le recrutement, les incompatibilités de fonction, le classement hiérarchique, la définition de la faute disciplinaire et les sanctions encourues, les récompenses, et dans une certaine mesure la notation et l’avancement, le devoir de réserve et de discrétion, etc.
En ce qui concerne les incompatibilités de fonctions des magistrats, on peut citer les incompatibilités avec l’exercice de tout commerce ou industrie et tout emploi dans une entreprise commerciale ou industrielle, la qualité d’auxiliaire de justice, notamment celle d’avocat ou d’huissier. Toutefois, le président de la République peut nommer ou autoriser la nomination d’un magistrat dans une société nationale ou dans une entreprise commerciale ou industrielle dans laquelle l’Etat détient une part du capital.
Du point de vue hiérarchique, les magistrats sont classés en magistrats hors hiérarchie, magistrats du quatrième grade, magistrats du troisième grade, magistrats du deuxième grade et magistrats du premier grade.
STATUT PARTICULIER DU CORPS DES MAGISTRATS
Les magistrats du siège siègent dans les tribunaux (juges, de grande instance, juges d’instance), les juges aux affaires familiales, les juges des enfants, les juges d’application des peines, les présidents de tribunaux, les juges d’instruction…
Les magistrats du siège ont un statut particulier puisqu’ils sont inamovibles et n’ont pas de contrôle hiérarchique, ce qui leur assure une indépendance vis-à-vis du pouvoir. Ils sont nommés par le Conseil Supérieur de la Magistrature (C.S.M) qui a également un rôle disciplinaire et le gouvernement, selon diverses modalités.
Les magistrats du parquet regroupent les procureurs de la République, procureurs généraux, et leurs substituts. Ils relèvent administrativement de l’autorité du ministre de la Justice. Ils lui sont subordonnés. Leur liberté de parole ne s’exerce à l’audience, lorsque des instructions leur sont données, qu’à condition qu’ils aient préalablement et en temps utile, informé leur chef hiérarchique direct de leur intention de s’écarter oralement des réquisitions écrites déposées conformément aux instructions reçues (article 3 du décret de 1995 précité).
Valère Wilfried BESSALA